septembre 16, 2020
Retour au Canada : peut-on échapper à la quarantaine ?
Toute personne, ou presque, entrant actuellement au Canada doit se soumettre à une obligation d’auto-isolement de 14 jours. Quels sont les contours de cette obligation, qui fait couler beaucoup d’encre ? Me Natacha Mignon, avocate en immigration et associée d’Immétis, démêle le vrai du faux.
Un décret contraignant pour les personnes entrant au Canada
Le décret 8 visant réduction du risque d’exposition à la COVID-19 au Canada régit les nouvelles obligations liées à la quarantaine en période de pandémie (le Décret).
La mesure la plus contraignante du Décret impose une période d’auto-isolement de 14 jours. À toute personne entrant au Canada, par voie aérienne ou terrestre.
Ayant pour objectif de stopper la propagation du virus, la mesure s’applique quelle que soit la citoyenneté ou le statut d’immigration (travailleur, étudiant, résident permanent) d’une personne. Le jour d’arrivée au Canada compte comme le premier jour, peu importe l’heure d’entrée au pays.
Si vous entrez au Canada le 14 novembre à 22 heures votre quarantaine prendra fin le 28 novembre à minuit.
En vigueur depuis le 25 mars 2020, la quarantaine demeurera en application jusqu’au 21 janvier 2021.
Peut-on se soustraire à cette obligation ?
Une question taraude donc les arrivants au Canada depuis près de 6 mois. À savoir s’ils pourraient se soustraire à l’obligation d’auto-isolement. Affirmons-le de prime abord : des exceptions existent, mais elles sont limitées et encadrées. S’agissant d’une mesure de santé publique, il y a, de plus, une responsabilité sociétale à respecter cette obligation.
Avant d’en venir aux exceptions, quelques vérités à rétablir. Ainsi, arriver au Canada avec un test COVID-19 négatif, faire partie des professions essentielles, venir d’un pays n’imposant pas la quarantaine aux Canadiens ou avoir effectué une période d’auto-isolement avant l’entrée au Canada ne permettent pas – seuls – de ne pas s’auto-isoler durant 14 jours.
Prévues à l’article 6 du Décret, la plupart des exceptions réfèrent à des situations très spécifiques, telles que les membres d’équipage, les membres des Forces canadiennes, les personnes engagées dans la lutte contre la COVID-19, les personnes du secteur de la pêche, ou membres du corps médical dans une certaine mesure.
Dans cette liste spécifique, l’article 6 (e) laisse au contraire une certaine place à interprétation et une ouverture pour solliciter une exception à la quarantaine, puisqu’il réfère à la personne entrant au Canada pour y fournir un service essentiel.
La notion de service essentiel permet-elle d’obtenir une exemption ?
La notion de service essentiel est à géométrie variable. Elle reçoit une définition différente en fonction des ministères : Agence de la santé publique du Canada, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada ou Emploi et Développement social Canada. Pour l’exemption de quarantaine du Décret, il faut se tourner vers la notion précisée par l’Agence de la santé publique du Canada, qui l’accorde notamment aux :
Techniciens ou spécialistes, qui à la demande d’un fabricant ou d’une entreprise, entrent au Canada pour entretenir, réparer, installer ou inspecter l’équipement nécessaires au soutien des infrastructures essentielles (énergie et services publics, technologies de l’information et des communications, finances, santé, alimentation, eau, transport, sécurité, gouvernement et secteur manufacturier) et qui sont tenus de fournir leurs services dans les 14 jours suivants leur entrée au Canada et ont des motifs raisonnables justifiant l’immédiateté de leur travail et l’incapacité de se planifier une quarantaine de 14 jours.
Agence de la Santé Publique du Canada
C’est sur cette dernière exemption que la plupart des demandes d’exemption sont aujourd’hui formulées par les entreprises privées, puisqu’applicable à différentes fonctions (technicien ou spécialiste) et aux infrastructures essentielles de secteurs aussi variés que les « énergies et services publics, technologies de l’information et des communications, finances, santé, alimentation, eau, transport, sécurité, gouvernement et secteur manufacturier ».
La demande d’exemption s’effectue habituellement à l’arrivée au Canada, auprès d’un agent d’immigration. Pour convaincre du bien-fondé de la demande, il est recommandé de remettre à l’agent un dossier étoffé complet.
Attestant que les tous les critères d’exception sont remplis. Répétons-le : travailler dans un secteur essentiel est une condition nécessaire, mais pas suffisante.
Les documents à joindre comprennent en général :
– une lettre d’invitation de l’employeur
– une description du mandat sur place
– un plan des mesures de prévention du risque épidémiologiste (ex. le travailleur partagera son temps entre son domicile et son lieu de travail seulement, et évitera toute autre sortie pendant 14 jours, etc.)
– une liste de ses voyages au cours des 3 derniers mois, voire un test COVID-19 négatif.
Une fois dispensée de quarantaine, la personne devra néanmoins bien se conformer aux mesures de prévention de la pandémie prévues au Décret. À savoir distanciation physique et port du masque.
À noter qu’il est possible de circonscrire l’incertitude d’une demande d’exemption de quarantaine présentée à l’arrivée. Et d’interroger, au préalable, l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) à leur adresse de courriel dédiée sur une situation personnelle. L’ASPC peut délivrer une opinion, mais n’émettra pas une lettre d’exemption.
Sachez que la quarantaine qui ne peut normalement être « rompue » pour raison médicale, peut également faire l’objet d’une levée de la mesure. Notamment en prouvant ne pas présenter de danger grave pour la santé publique.
Par Me Mignon, Avocate en immigration et Associée chez Immétis
Le présent article porte sur une actualité récente, susceptible d’évoluer rapidement et conjointement avec la crise. Sa dernière mise à jour date du 18 décembre 2020.
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